Inserm U722
 
 
 
 
Potentiel adaptatif d’Escherichia coli : approche théorique et expérimentale
Pierre-Alexis GROS
27 septembre 2010

RESUME

Les microorganismes sont capables de s’adapter rapidement face à de nouvelles pressions de sélection comme en témoignent l’émergence puis la diffusion de résistances aux antibiotiques. Les mutations, notamment chez les organismes asexués, constituent l’un des principaux moteurs de l’évolution et leur taux d’apparition et leur effet sélectif sont parmi les observables majeures qui déterminent le futur évolutif d’une espèce. Dans ce travail, nous avons voulu déterminer l’effet des nouvelles mutations sur la valeur sélective en utilisant des approches théoriques et expérimentales.

Appliquant la théorie de la génétique des populations au modèle géométrique de Fisher, nous avons montré que la robustesse génétique est favorisée dans les situations où l’efficacité de la sélection naturelle est réduite par une dérive génétique forte et ce quelque soit l’importance de la pression mutationnelle. Cette dérive est particulièrement forte chez les organismes complexes et lorsque les mutations délétères se renforcent mutuellement (épistasie synergique). Nous avons également montré que les mêmes conditions favorisent l’émergence d’épistasie antagoniste. De plus, nous avons mis en évidence un antagonisme entre les effets à long terme et à court terme de la robustesse et de l’épistasie.

Enfin, nous avons mis au point un protocole de mesure de valeur sélective utilisant courbes de croissance et compétitions avec une souche d’Escherichia coli fluorescente. Nous avons appliqué ce protocole à l’étude de la distribution des effets des mutations sur la valeur sélective chez des lignées d’accumulation de mutations ainsi que pour des mutations touchant un seul gène du chromosome.


ABSTRACT

Microorganisms are capable of large and rapid adaptations when faced with new selective pressures as illustrated by the fast emergence and diffusion of antibiotic resistance. Mutations are the ultimate fuel of evolution especially in asexual organisms. Their rate and their effect are among the most important parameters that determine the evolutionary fate of an organism and estimates of both are sorely needed if we want to understand any aspect of evolution and especially if we want to be able to predict it. In this study using theory and experiments, we try to determine the effects of new mutations.

Using the population genetics framework applied to Fisher’s geometric model, we show that robustness to mutations can be selected for when the removal of deleterious mutations in an asexual population is limited by genetic drift, regardless of the intensity of the mutational pressure, which can be arbitrarily small. Such drift is found to be more pronounced in complex organisms and when deleterious mutations are mutually reinforcing (synergistic epistasis). We also show that the same conditions can lead to the selection for antagonistic epistasis. In addition, we highlight some possible antagonisms on fitness between the short term and the long term effects of mutational robustness and epistasis.

We also developed some fitness assays by means of growth curves and competitions with a fluorescent Escherichia coli strain. We applied these procedures to study the distribution of fitness effects in lineages resulting from a mutation accumulation experiment and from the mutagenesis of a single chromosomal gene